Les arts modestes

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Présentation

Après diverses pérégrinations et une carrière de céramiste (de nombreux collectionneurs possèdent ses soldats Empire) Bernard Belluc se tourne vers l’art Modeste. Collectionneur modeste sans le savoir, il a amassé pendant de longues années un monceau d’objets récupérés aux puces, chez des amis ou dans la rue et ses poubelles, remplissant ainsi une maison entière. Avec H. Di Rosa, collectionneur lui aussi, l’idée de mettre en scène tous ces objets germe en 1990 et se voit concrétisée en novembre 2000, dans la réalisation du Musée International des Arts Modestes (MIAM) à Sète.

diro belluc

H.Dirosa et B.Belluc (1999)

Les thèmes des vitrines de Bernard Belluc : 

 ©Photos P.Schwartz/MIAM

Définition

Tout objet étant respectable, y compris les cadeaux Bonux ou les poupées Barbie, parce qu’issu du travail humain, il s’agit pour l’art modeste de mettre en valeur les choses les plus banales, les plus quotidiennes, en portant sur elles un regard qui n’est plus utilitaire, mais chargé d’affection, grâce à des assemblages, des mises en scène, à la création d’environnements qui vont leur donner une âme. Selon Di Rosa, la fonction de l’art est d’« envahir la vie, de la rendre moins dérisoire. » « C’est l’art du caniveau, celui qui met des couleurs dans les poubelles » dit Belluc. Coincé entre l’art Brut, l’art Populaire, la publicité, l’art Naïf, les arts Primitifs, l’art Modeste, aux limites ondoyantes, est celui de la société de consommation noyée par les objets, ou celui décliné par des personnes ayant peu ou pas de culture artistique. A la frontière de l’art brut, ces « créateurs » fabriquent des objets souvent pour le seul plaisir que cela leur procure, utilisant les rebuts que notre monde moderne produit. L’art modeste est une expression artistique qui exprime une critique de l’enfermement orgueilleux de l’art sur lui-même, sans communication, et soumis aux seules règles du marché. De ce fait, l’« artiste modeste » veut être compris de tous, chacun pouvant s’approprier l’œuvre modeste, autant intellectuellement que matériellement. Un artiste modeste n’établit pas de hiérarchie entre les différentes formes d’art, chacune ayant sa valeur, d’où la diversité des « créations modestes ».

Échantillonnage non exhaustif sur les créations arts modestes  

©Photos du livre « l’art modeste »/Hervé Di Rosa (edition Hoebeke)

Origine de l’expression

L’un des fondateurs de «L’ art modeste » est le peintre Hervé Di Rosa. Celui-ci est parti du lapsus commis par une petite fille lors d’une exposition de son œuvre au musée des enfants du musée d’Art moderne de la Ville de Paris, en 1988, « Viva Di Rosa ». L’enfant demandait à sa mère quand elle pourrait revenir au « musée de l’art modeste ». Di Rosa a été intéressé par cette qualification correspondant au principe d’humilité qui fonde son œuvre, contre la prétention d’artistes conformistes ou élitistes.

L’éducation du regard

L’artiste par la qualité de son regard nous incite à considérer les objets différemment. Ils ne sont plus appréhendés pour leur coté utilitaire mais pour leurs qualités plastiques ; formes, couleurs et matières étant vues comme autant de potentialité d’expression. Belluc voit du beau (et pas le beau) dans les objets, la curiosité et l’imagination aideront les enfants à appréhender les objets de façon « artistique ». A condition de rompre avec le déterminisme des objets, de favoriser les perceptions et de mettre en route les capacités à détourner les objets.

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L’indien à carreaux Bernard Belluc © photo F.Lagarde

« L’art modeste n’est ni un concept, ni un mouvement. C’est un regard, il montre ce que l’on ne regarde pas. Il a des frontières mouvantes. » Hervé Di Rosa

La collecte d’objets

Il est nécessaire d’avoir un stock assez important afin de constituer des réserves de matières de formes, de couleurs et d’avoir le choix dans les possibilités d’arrangements mais aussi pour déclencher des idées, pour concevoir des collections, des séries, des accumulations. La phase de stockage va aussi permettre de manipuler, ranger,classer…autant d’occasion pour faire connaissance avec les objets. Quant au mauvais goût le regard « modeste » ne l’élimine pas d’emblée, Belluc parle de son utilisation à des fins volontairement dérangeantes ou provocatrice.

©Photos F.Lagarde/collections Belluc

« Il faut sauver cette petite archéologie, cette mémoire fragile, tous ces objets qui auraient dû être jetés. Les gens ont réalisé de leurs mains des fantasmagories prodigieuses. Imaginez ce que l’on aurait appris du passé, d’autres civilisations si on les avait conservés toutes ces menues choses que nous avons appelées l’art modeste.  » Bernard Belluc

Mise en scène, en boites ou en vitrines

Les objets seront choisis, organisés et montrés en fonction de ce que le créateur veut privilégier. L’aspect narratif : les objets vont raconter une histoire et leur arrangement vont favoriser soit une lecture chronologique soit des effets de « flashes ». L’histoire peut être suggérée ou bien affirmée. L’aspect plastique, où l ’on s’attachera plus aux qualités plastiques qu’à l’aspect symbolique ou utilitaire. On mettra l’accent sur le rapport des éléments entre eux, la composition, le travail de lumière. L’aspect émotionnel que déclenchent les objets, parce qu’on les retrouve longtemps après les avoir oubliés, parce qu’ils sont liés à l’histoire de personnes proches, parce qu’il y a une part de magie dans l’objet inanimé. Les créateurs ont souvent donné vie aux objets en les humanisant. Les émotions sont parfois amenées par association d’idées et font intervenir tous les sens (les bidons d’huile de la route Hannibal qui rappelle l’odeur âcre du garage auto situé sur le chemin de l’école de notre enfance…) Les réalisations possibles sont nombreuses : le musée personnel, un travail sur la mémoire et le souvenir, raconter des histoires, exprimer des sensations, des émotions, faire des inventaires, collectionner à partir d’un mot, d’une idée, d’analogie de formes etc.. Pour présenter les réalisations, cela va de la boîte à l’armoire ou à la vitrine en passant par la valise qui offre l’avantage d’un transport facile.

Texte rédigé par l’academie-montpellier/artsecole/

En 20 ans, le MIAM a exposé plus de 400 artistes. 

Lien site du MIAM : Expositions passées